18 avril 2010

Je ne serai pas ethnologue

#jedecouvredoncjesuis


Cette semaine de vacances a été vécue comme une observation participante quotidienne. Voyage entre gériatrie et petite enfance.
Tout a commencé aux archives départementales. L’endroit le plus putride qu’il puisse exister, une salle aux murs verts épinard, à la moquette mitée, aux documents friables et poussiéreux et aux employées aimables comme des portes de prison. En soi, l’idée d’aller explorer les lettres d’amour que les poilus envoyaient à leurs femmes avant de mourir sur le front, ou de découvrir que son arrière grand père a eu une aventure avec sa grande tante, cela a un petit côté palpitant, croustillant, voire émouvant. Mais quand on y va pour se documenter pour son mémoire, qu’à peine entrée on rêve de faire demi-tour et qu’on y passe minimum 7heures par jour car les recherches sont longues et infructueuses, la quête du graal prend vite des allures de croisades ratées.
Mais qu’à cela ne tienne, puisque ce lieu épouvantable aller devenir ma seconde maison pour une semaine, autant se l’approprier en bonne et due forme.
Premier jour : faire amie-amie avec les autres personnes de la salle de lecture, histoire de se détendre un peu pendant les pauses -soit tous les quarts d’heures environ-. Ah non, c’est raté, il est formellement interdit de parler, des affiches jaunies par le temps, dactylographiées et patafixées sur les murs me le rappellent environ tous les 2 mètres. Un silence de mort règne, j’en entends même la trotteuse du gousset de mon voisin. Pourtant, après 3 heures passées à jeter un coup d’œil au cadastre de 1875 -certainement les heures les plus longues de ma vie-, le dudit voisin au gousset se risque quand même à une tentative d’approche et décide de m’adresser la parole. Mon héros ! Il avait osé de braver l’interdit, alors que la peureuse que j’étais avait eu trop peur du courroux de l’employée aux cheveux gras (employée numéro 1). Pour ma défense, elle ne cessait de m’envoyer un regard noir dès que je toussais ou faisais tomber mon stylo. Si j’avais prononcé le moindre mot, je n’ose imaginer qu’elle aurait été sa réaction.
Mais, malgré l’effort surhumain de mon intrépide voisin, je suis restée muette. Il aurait mérité que je lui réponde, c’était quand même la moindre des choses ! Il avait risqué l’expulsion pour moi, eh oui, on ne rigole pas aux archives ! Je suis donc demeurée silencieuse, impassible. #nonjenesuispasunelâche. Les regards méchants que me lançaient à son tour l’employée numéro 2, celle aux dents pivots cariées, ne m’effrayaient plus. Ce qui me retenait d’aller plus loin, c’était simplement l’odeur de pipi qui émanait de la couche de mon ex-presque nouvel ami. Oui, mon voisin de table avait dans les 90 ans, il portait un sonotone et, outre le fait qu’il ait tenté de m’amadouer avec un Werther’s original -ce qui aurait du me mettre la puce à l’oreille dès le début- une odeur nauséabonde se dégageait de son pantalon. Désolé papi, je ne fais pas dans les incontinents !

Le deuxième jour, parée, j’ai amené un échantillon de parfum, des mouchoirs à l’eucalyptus qui sentent bon, mon I-pod et mon ordinateur portable. Pour ceux qui connaissent un peu le système des archives (eh eh vous ne devez pas être nombreux bande de petits chanceux), vous devez vous demander comment j’ai fait. Il faut savoir en effet qu’entrer dans la salle de lecture munie de toute cette artillerie relève de l’exploit. Normalement, on doit tout laisser à l’entrée dans un casier. Les archives c’est à mi chemin entre les vestiaires de la piscine et la douane de l’aéroport, on n’y entre jamais, ô grand jamais, sans avoir au préalable déposé son sac à main/son portable/sa bouteille d’eau/ ses vivres/sa veste/ dans un coffre qui coûte la modique somme de 2euros (et qui nécessite donc de posséder une pièce de 2 euros et pas seulement une carte bleue ou un billet de 10 !! #maispourquoijenaijamaisdemonnaiesurmoi ?). Du coup, la première fois, arrivée un peu en touriste avec tout mon attirail, j’avais paniqué à la vue des énormes pancartes d’information et, en bonne citoyenne que je suis, je m’étais exécutée. J’avais tout, mais absolument tout, laissé dans le casier. Imaginez passer une journée dans une pièce qui sent la naphtaline et l’urine, avec des personnes d’une moyenne d’âge de 70 ans, sans pouvoir faire le moindre bruit et sans ordinateur ni téléphone… #justhell . Mais, naïve que j’étais, je me suis vite rendue compte que tout cela s’était de l’esbroufe, ces pancartes et ce règlement c’était pour nous faire peur, bien sûr que j’avais le droit de prendre mes affaires ! Si papi avait le droit d’amener sa sonde alors j’avais bien le droit de prendre mon laptop ! La guerre était déclarée ! Et ça a marché, l’employée numéro 3, celle à pustules, ne m’a rien dit quand elle m’a vu entrée munie de toute cette technologie. Je le savais !
Ah, je revivais, que la vie était belle, lalalalalalala, vive mon ordi portable, vive ma musique. Mais après avoir tapoté deux heures comme une furie et remplie 6 pages Word #lesarchivesçavousdonneunepêche, voilà qu’une mamie du 4ème âge, ridée à telle point que je pensais que quelqu’un lui avait creusé le front, me brise dans mon élan. Le rêve redevenait cauchemar ! Mamie Nova osait m’alpaguer pour me demander de faire moins de bruit, alors que Madame Chut, Madame Pustules et Madame Regard noir ne m’avaient encore rien dit.
« Jeune fille, excusez moi, pourriez vous taper plus lentement sur vos touches s’il vous plait ? Et pourriez-vous écouter un peu moins fort votre musique de « sauvages » ? »
Pardon, aurais-je mal compris ? Elle avait besoin d’une loupe pour lire et elle voulait me faire croire que son ouïe était aussi bonne qu’à ses 18 ans ? Il y avait une conspiration contre moi.
Après Mister Pipi qui avait tenté la douche dorée, voilà qu’Hospice Lady faisait des siennes. C’en était trop. Il n y aurait pas de troisième jour aux archives, ils m’avaient poussé dans mes retranchements. Je partais donc tête haute, à la rencontre d’une nouvelle expérience sociologique, emportant quand même dans mes poches la colle à appareil dentaire d’Hospice Lady, #fallaitpasmechercher.
Le mercredi, jour des enfants, nouvelle observation participante. Je babysitte pour ma petite cousine de 2 ans. Mains dans les cheveux pleines de chocolat, purées de carotte sur le haut en soie, sanglots incessants, Pocahontas par ci, Oui Oui par là… Bref, que du traditionnel, jusqu’au moment où je me suis retrouvée à devoir expliquer à sa mère pourquoi un œuf bleu lui était accidentellement poussé sur front. Oups. En fait je pense que j’étais plus à mon aise chez papyland que chez les Razmoquette. #renvoyezmoichezlesvieux ! Le problème c’est qu’elle a voulu essayé mes chaussures à talon, pointure 39. Je trouvais ça drôle et même si elle fait du 3 et qu’elle débute dans la fonction « debout, un pied devant l’autre chouette je marche », et que ça aurait pu m’alerter ; apparemment elle a l’habitude de piquer les chaussures des gens, donc je ne me suis pas plus inquiétée que ça. Pendant 10 bonnes minutes, elle a donc défilé avec plus ou moins d’aisance dans mes Nine West turquoise, avec le sourire jusqu’aux oreilles, jusqu’à ce que bien sûr, le drame se produise. Elle s’entrave, tombe, et se prend le coin de table.
Est-ce qu’on peut donner des granules homéopathiques d’arnica à des bébés ? Il est où le Meutripan ? Le mercurochrome c’est que quand y a du sang, non ? Si je mets du fond de teint sur la bosse personne ne remarquera rien, hein ?

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